Lettre de François Desgrées du Loû à Pierre Martin - 11/08/1944 [copie]

Publié le par François Desgrées du Loû (1909-1985)

[publié le 20/11/2022]

[transcription]

Le Loû ce 11 Août 1944

Cher Monsieur Martin,

Au moment de partir pour Rennes, je veux vous demander - non pas comme membre des F.F.I., mais à titre personnel - de nous aider si possible de votre vaste influence à dissiper le malentendu peu grave, mais regrettable, qui éloigne plus ou moins de notre groupe de bons patriotes comme MM. Le Prince, Duclos et peut-être d’autres. Dans ce but, je me permets de vous exposer ce que je crois être la vérité dans cette affaire.

Les F.F.I. n’ont évidemment pas qualité pour exercer des fonctions judiciaires. Mais comme la justice exige que ceux des Français qui ont “collaboré” ne soient pas traités comme les autres, le commandant local des F.F.I. consent à éclairer les autorités dans la mesure du possible, ne serait-ce que pour éviter des vengeances personnelles, des excès, ou des impunités scandaleuses. Ce que certains de ces messieurs n’ont pas compris, c’est que s’ils peuvent aider par leur documentation impartiale et précise à ébaucher la vérité en vue des prochaines sanctions, ils risqueraient d’attirer un désaveu aux F.F.I. ou à eux-mêmes s’ils PARAISSAIENT s’ériger en tribunal ou en juge d’instruction. C’est dans l’intérêt même de la justice, et pour éviter que la Préfecture ne paraisse donner un jour à la Résistance un camouflet qui réjouirait les collaborateurs, que même les apparences d’une intrusion illégitime doivent, à mon avis, être proscrites. Et j’ajoute qu’après avoir “tenu le coup” d’accord pendant des années d’occupation, nous serions impardonnables d’entrer, pour des vétilles, dans des discussions amères. Il ne s’agit pas de garder le silence et de laisser les autorités dans une ignorance qui inquiéterait les honnêtes gens, mais simplement de s’abstenir de tout acte réservé aux juges (convocations et interrogatoires, à plus forte raison sanctions improvisées).

Je ne vois rien là-dedans qui soit de nature à indigner les patriotes, bien au contraire, et je pense que vous serez d’accord avec moi pour empêcher si possible toute scission. Ce n’est vraiment pas le moment!

Croyez, cher Monsieur, à mes sentiments cordialement dévoués.

[réponse de Pierre Martin]

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