Lettre de Henri Desgrées du Loû à sa bru Jeanne Hamonnno - 23/02/1892 [correspondance]

Publié le par Henri Desgrées du Loû (1833-1921)

[publié le 23/09/2022]

[lettre précédente]

[transcription]

Vannes le 23 février 1892.

Ma chère Jeanne, vous m’avez demandé de vous écrire, à vous, et je vous écris, à vous, comme je vous l’ai promis, avec plaisir, comptant toujours comme mes meilleurs moments ceux que je passe avec vous. Je vous ai déjà dit combien j’avais été heureux de vous voir dans votre intérieur, et je n’y reviendrai pas; je me contente de vous suivre d’une pièce à l’autre, aux heures où vous êtes seule et à celles, plus heureuses, où vous êtes réunis; je vous écoute mieux au piano, tantôt seule, tantôt accompagnant Emmanuel qui ne rêvait pas il y a quelques année une telle maîtresse de chant; en un mot, je vous l’ai déjà dit, je vous le dirai encore souvent, je l’espère, votre bonheur est le mien, vos inquiétudes sont les miennes et il ne se passe pas de jour où ma pensée ne soit près de vous, où je ne remercie Dieu de ce qu’il a fait pour vous et par là-même, pour moi. J'ai reçu hier une excellente lettre de votre mère; je l'aime beaucoup de ne pas m'oublier, de comprendre que votre union avec Emmanuel nous unit nous-mêmes par l'affection que nous avons pour vous. Elle me parle comme elle l'aura fait sans doute en vous écrivant, du mariage de votre cousin dont elle se montre très satisfaite; elle me parle aussi d'une un projet sur le commissariat qui en serait la ruine s'il venait à passer. Que veut-elle dire? Est-ce qu’il serait encore question de vous retirer l’inscription maritime? Je ne sais pas du tout de quoi il s’agit et je vous demanderai bien de m’en informer quand vous me répondrez.

Il y a encore une grosse question à laquelle je ne vous ai pas répondu il y a huit jours en vous écrivant; c'est celle du livre de cuisine. Votre belle-mère est en train de traiter cette sujet dont elle ne me juge pas digne et je pense que vous n'avez que l'embarras du choix. Avez-vous des projets pour le Carnaval ? Nous allons avoir Dimanche lundi et mardi des congés plus ou moins complets accompagnés d'intermèdes musicaux et dramatiques. Mardi nous devons prendre part chez les St Georges à un déjeuner à grand orchestre; je viens vous demander néanmoins si vous pouvez, ce jour là, le seul dont ils puissent disposer, recevoir Pierre et Henri. Je sais qu'ils ont un grand désir de vous aller voir, mais je ne veux leur en parler que si rien ne s'oppose de votre côté à cette heureuse rencontre. Si vous êtes, ce jour là, parfaitement libre de vos moments, auquel cas, nous remettrions cette visite à Pâques. Ce qui serait bien beau, serait de vous avoir ici le Dimanche gras, mais c'est peut-être une mauvaise pensée que j'ai là, et je me hâte de la chasser. Je ne vous ai encore rien dit de nos parents. La pauvre Marthe vient d’avoir une fluxion de poitrine qui pour être avoir été bénigne - ne l’en a pas moins laissée dans un état de faiblesse extrême. Elle s'est levée hier pour la première fois et n'aurait point fait à pied, je vous en réponds, la trotte du Paradouzik à Plougastel. Pietrina est remise et tient compagnie à sa sœur. Les oncles et les tantes vont bien. Avez-vous entendu parler de Marie votre cousine de Kerdudo ? Elle devait [rallier?] à la fin du mois. Votre b. mère me remet la note relative aux livres de cuisine; je puis ajouter que Millet Robinet est beaucoup plus complet qu'elle ne le dit. On y apprend la manière de tuer un porc. Voilà qui est instructif! Je crois que votre tante de Kerouallan, personne mieux en cuisine, se sert triomphalement de l’autre. Allons, vous n’êtes pas au bout, ma chère Jeanne, et voilà que la vie s’offre à vous sous forme d’un amoncellement de casseroles, gibier, volailles et restes, hélas! restes à accommoder! C’est là le triomphe des esprits délicats. Et là dessus, je vous embrasse, vous priant d'en faire autant de ma part à Emmanuel. Il paraît que madame Faivre toussote toujours. Gardez-vous de l’imiter. 

Henri.

[lettre suivante]

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article