Deuxième discours de l'Evêque de Münster, 3 août 1941 [tapuscrit conservé pendant l'occupation]

Publié le par Clemens August von Galen (1878-1946)

[publié le 31/12/2021]

[in Souvenirs de l’occupation et de la résistance

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Certains papiers ont été enterrés par prudence à la fin de l’Occupation et retrouvés ensuite [annotation François Desgrées du Loû]]

[document non daté - la date est celle du discours]

[transcription]

DEUXIÈME [le premier discours, daté du 14 juillet 1941, a été communiqué auparavant - note de bas de page] DISCOURS DE L'ÉVÊQUE DE MUNSTER

S. Exc. Mgr. Clément-Auguste von GALEN.

dans l'Église Saint-Lambert à Münster, le 3 août 1941

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Après lecture de l’Évangile du jour, 9ème dimanche après la Pentecôte, “Lorsque Jésus approcha de Jérusalem et qu’Il aperçut la ville Il pleura sur elle”.

Mes Chers Diocésains,

C’est un événement prodigieux que nous rapporte l’Évangile de ce jour. Jésus pleure. Le Fils de Dieu pleure. Qui pleure, souffre. Souffrances du corps ou souffrances du cœur, que ne dût-il pas souffrir dans son âme, pour en arriver à pleurer, Lui le plus courageux des hommes. Pourquoi pleura-t-il? Il pleura sur Jérusalem, la ville sainte, la capitale qu’Il aimait tant. Il pleura sur ses habitants, ses compatriotes, parce qu’ils ne reconnaissaient pas ce qui seul pouvait détourner le châtiment que prévoyait son omniscience et que sa justice divine avait déjà décrété: “Ah, si cependant tu reconnaissait ce qui doit te donner la paix”. Pourquoi les habitants de Jérusalem ne le reconnaissaient-ils pas? Jésus l’avait expliqué peu de temps auparavant: “Jérusalem, Jérusalem, que de fois ai-je voulu rassembler tes enfants comme une poule rassemble ses poussins sous ses ailes. Mais tu n’as pas voulu”. Tu n’as pas voulu. Moi, ton Roi, moi, ton Dieu, je voulais. Mais tu ne voulais pas. Sous l’aile de la poule, comme le poussin est bien caché, gardé, protégé. Elle le réchauffe, elle le nourrit, elle le défend. Ainsi je voulais, moi aussi, te protéger, te garder contre tout danger. Je voulais; toi, tu n’as pas voulu.

C’est pour cela que Jésus pleure, cet homme fort, c’est pour cela que Jésus pleure. Sur la folie, sur l’injustice, sur le crime du non-vouloir, et sur le malheur qui s’en suivra, que son omniscience voit arriver, que sa justice doit décréter, quand l’homme oppose son non-vouloir aux commandements de Dieu, aux inspirations de sa conscience, aux invites pleines d’amour de l’Ami divin, au meilleur des Pères. “Si cependant tu reconnaissais, aujourd’hui même, ce qui doit te valoir la paix. Mais tu n’as pas voulu”. C’est quelque chose d’effroyable, une injustice inouïe et souverainement néfaste, lorsque l’homme presse sa volonté contre la volonté de Dieu. “Je voulais… Toi, tu n’as pas voulu…” C’est pour cela que Jésus pleure sur Jérusalem.

Mes Frères, dans la lettre collective de l'Épiscopat allemand du 26 juin, lue dans toutes les églises d’Allemagne le 6 juillet, il est dit: “Sans doute y a-t-il, d’après la morale catholique, des préceptes positifs qui n’obligent plus, lorsque leur accomplissement s’accompagne de trop grosses difficultés. Mais il existe aussi de saintes obligations de conscience, dont personne ne peut nous délier et que nous devons remplir, quoi qu’il en coût, même au prix de la vie: jamais en aucune circonstance, l’homme ne peut, sauf en temps de guerre et dans le cas de légitime de défense, tuer un innocent.

J’ai déjà eu l’occasion, le 6 juillet, d’ajouter à ces mots de la lettre collective les explications suivantes:

“Depuis quelques mois, nous apprenons que des pensionnaires, malades depuis longtemps déjà et paraissant probablement incurables, sont sur ordre de Berlin, emmenés de force d’établissements de santé et de cliniques pour malades mentaux. Régulièrement, la famille reçoit alors quelques temps l’avis que le malade est décédé, que son corps a été incinéré et que les cendres peuvent être réclamées. On soupçonne généralement, et [2] ce soupçon touche à la certitude, que ces nombreux cas de mort inopinée de malades mentaux ne se produisent pas tout seuls, mais sont provoqués de propos délibéré, et qu’on suit en cela la doctrine prétendant qu’on peut supprimer “la vie indigne d’être vécue”, et donc tuer innocents, lorsqu’on estime que leur vie n’a plus de valeur future pour le peuple et la patrie. Doctrine terrible, qui prétend justifier le meurtre d’innocents, qui autorise en droit la mise à mort violente d’invalides incapables de travail, d’estropiés, de malades incurables, de vieillards affaiblis”.

D’après ce que j’ai appris de source autorisée, on dresse actuellement aussi dans les établissements de santé et dans les cliniques de Westphalie des listes de pareils pensionnaires,  qui seront transférés ailleurs comme “citoyen[s] improductifs”et après quelques temps mis à mort. De l’institution de Marienthal, près de Münster, est parti, au cours de cette semaine, un premier contingent.

Femmes et hommes allemands, il a encore toujours force de loi l’article 211 du Code de droit qui stipule : “Celui qui tue délibérément tue un homme, lorsque l’acte est posé avec préméditation, sera puni de mort pour meurtre”. C’est précisément afin de prémunir contre cette peine légale ceux qui tuent délibérément ces pauvres malades, membres de nos familles, que les malades destinés à être mis à mort sont transportés de leur résidence dans un lieu éloigné. Comme cause de la mort, on indique alors une maladie quelconque. Comme les cadavres sont aussitôt incinérés, ni la famille, ni la police judiciaire ne peuvent ultérieurement établir si cette maladie a réellement existé et quelle que fut la cause de la mort. On m’a cependant assuré qu’au Ministère de l’Intérieur et au département du Führer des médecins du Reich, le Dr Conti, on ne fait aucun mystère qu’effectivement un grand nombre de malades mentaux ont déjà été délibérément mis à mort en Allemagne et le seront encore à l’avenir.

Le Code de droit pénal du Reich stipule à l’art. 139: “Celui qui de source digne de foi a connaissance d’un projet d’attentat à la vie d’un homme et n‘en avertit pas en temps utile l’autorité ou l’intéressé sera puni…”

Lorsque j’eus connaissance de l’intention de transporter des patients de Marienthal pour les tuer, j’en ai avisé le parquet près le tribunal de Münster et M. le Président de police de Münster, par lettre recommandée, dans les termes suivants :

“D’après les nouvelles qui me sont parvenues, au cours de cette semaine (on parle du 31 juillet), un grand nombre de pensionnaire de la maison de santé provinciale de Marienthal-lez-Münster seront transférés, en tant que citoyens prétendûment “improductifs”, à la maison de santé de Eichberg, pour y être bientôt délibérément mis à mort, comme cela s’est déjà fait, suivant l’opinion générale, après des transferts analogues d’autres maisons de santé. Comme pareil procédé, non seulement est contraire à la loi morale, divine et naturelle mais doit aussi être puni de mort, d’après l’art. 211 du Code de droit pénal allemand, il est de mon devoir, conformément à l’art. 139 de ce même Code, de le dénoncer; je demande de protéger immédiatement nos compatriotes menacés contre ceux qui ont l’intention de les transférer et de les mettre à mort et de me faire savoir ce qu’on aura décidé”.

Je n’ai reçu aucune nouvelle d’une démarche, ni du parquet, ni de la police.

Le 28 juillet déjà, j’avais adressé par écrit une sévère protestation à l’administration provinciale de Westphalie, de qui dépendent les établissements auxquels les malades sont confiés pour être soignés et guéris. Cela n’a servi à rien. Un premier transport d’innocents condamnés à mort a quitté Marienthal. Et de la maison de santé de Warstein, on a déjà, à ce que j’apprends, emmené 800 malades.

[3]

Nous donc devons nous attendre à ce que ces pauvres malades sans défense seront tôt ou tard supprimés. Pourquoi ? Non pas parce qu’ils ont commis quelque crime méritant la mort ; non pas parce qu’ils ont attaqué un de leurs gardiens ou de leurs infirmiers, de sorte que ceux-ci, se trouvant dans le cas de légitime défense, n’auraient eu d’autre ressource, pour sauver leur propre vie, que d’user de violence envers leur agresseur. Ce sont là des cas où le recours à la violence, même au risque de tuer, est licite et souvent même obligatoire, tout comme le fait de tuer un soldat ennemi armé au cours d’une juste guerre.

Non, ce n’est pas pour des motifs de ce genre que ces pauvres malades doivent mourir, mais bien parce que, de l’avis d’un médecin quelconque, suivant l’estimation de l’une ou l’autre Commission, ils sont devenus “indignes de vivre”, parce, à leurs yeux, ils sont à ranger parmi les “citoyens improductifs”. On estime qu’ils ne peuvent plus produire de richesses, qu’ils sont comme une vieille machine qui ne fonctionne plus, comme un vieux cheval devenu incurablement boiteux, comme une vache qui ne donne plus de lait. Que fait-on de cette vieille machine ? on la met au pilon. Que fait-on de cette vieille vache, de cette tête de bétaille [sic] improductif? Non, je ne veux pas pousser plus loin cette comparaison; la portée, la force probante en sont trop terribles. Il ne s’agit pas ici de machines, il ne s’agit pas ici de chevaux et de vaches, dont la seule fin est de servir aux hommes, de fournir des richesses aux hommes. On peut les sacrifier, on peut les abattre, dès qu’ils ne remplissent plus leur rôle. Non, il s’agit ici d’hommes, de nos prochains, de nos frères et sœurs, de pauvres gens, de malades. Des êtres improductifs, soit, mais ont-ils pour autant perdu le droit de vivre? N’as-tu, n’ai-je, moi, le droit de vivre qu’aussi longtemps que nous sommes productifs? Qu’aussi longtemps que d’autres nous reconnaissent comme productifs? Si l’on admet en principe qu’on peut tuer des hommes improductifs, malheur alors à nous tous, lorsque nous devenons vieux et affaiblis par l’âge! Si l’on peut tuer des hommes improductifs malheur alors aux invalides qui pour produire ont employé, sacrifié et usé leurs forces et leurs bras! Si l’on peut, par la violence, supprimer le prochain improductif, malheur alors à nos vaillants soldats qui rentrent au pays comme grands blessés de guerre, estropiés ou invalides.

Dès qu’on admet que des hommes ont le droit de tuer leurs semblables improductifs, même si provisoirement on ne touche qu’aux pauvres malades mentaux sans défense, on admet cependant déjà en principe le meurtre de tout être vivant improductif, notamment des malades incurables, des estropiés inaptes au travail, des invalides du travail et de la guerre, oui, de chacun de nous, lorsque nous serons devenus vieux et affaiblis par l’âge et par là même improductifs! Il suffira dès lors d’une instruction secrète quelconque, pour étendre le procédé essayé sur les malades mentaux et l’appliquer à d’autres “improductifs”, aux tuberculeux incurables, aux vieillards débilités, aux invalides du travail, aux soldats grands blessés de guerre!

Plus aucun de nous alors ne sera sûr de sa vie. N’importe quelle commission pourra le mettre sur la liste des “improductifs” devenus à son avis indignes de vivre. Et aucune police ne pourra le protéger, aucun tribunal ne pourra venger son meurtre et infliger au meurtrier le châtiment qu’il mérite. Qui pourra encore alors avoir confiance en un médecin? Celui-ci n’aura qu’à signaler le malade comme “improductif”, pour obtenir l’autorisation de le tuer. Il est impossible d’imaginer à quelle dépravation des mœurs on aboutirait, à quelle défiance mutuelle et générale au sein même des familles, si cette effroyable doctrine était tolérée, admise et appliquée. Malheur aux hommes, malheur à notre peuple allemand, si non seulement  on transgresse le commandement sacré: “Tu ne tueras pas”, que le Seigneur a promulgué au Sinaï au milieu du tonnerre et des éclairs, que Dieu notre créateur, a dès l’origine gravé dans la conscience des hommes, mais si l’on en arrive même à tolérer cette transgression et à la laisser commettre impunément.

[4]

Je veux vous donner un exemple de ce qui se passe actuellement. Il y avait à Marienthal un homme d’environ 55 ans, un paysan d’une commune rurale des environs de Münster, je pourrais vous citer le nom, qui depuis quelques années souffrait de troubles mentaux et avait pour ce motif été confié aux soins de la maison de santé provinciale de Marienthal. Il n’était pas complètement fou; il pouvait même recevoir des visites et aimait beaucoup que sa famille vienne le voir. Il y a quinze jours encore, il avait reçut la visite de sa femme et de son fils, soldat au front, qui était rentré chez lui en congé. Le fils est très attaché à son père, aussi le moment du départ fut-il pénible: qui sait si le fils reviendra et reverra son père en ce bas monde, car on a depuis inscrit celui-ci sur la liste des improductifs. Un des membres de la famille voulant, cette semaine, visiter le père à Marienthal, n’y fut point admis et on lui dit que, sur ordre du Conseil des Ministres pour la Défense Nationale, le malade avait été transféré ailleurs, mais qu’on ne pouvait indiquer où. Notification en serait faite à la famille d’ici quelques jours.

Quelle sera la teneur de cette notification? Sera-ce de nouveau comme dans d’autres cas, que l’homme est décédé, que le cadavre a été incinéré et qu’on délivrera les cendres contre remboursement des frais? Le fils alors, qui se trouve au front et risque sa vie pour ses compatriotes allemands, ne reverra plus son père ici-bas, puisque ses compatriotes allemands l’ont fait périr? Les faits que je vous rapporte ici sont absolument certains. Je puis vous citer les noms du malade, de sa femme, de son fils soldat, ainsi que l’endroit où ils habitent.

Tu ne tueras point! Dieu a inscrit ce commandement dans la conscience des hommes, bien avant qu’un code pénal ait menacé d’une peine le meurtre, bien avant qu’un parquet ou qu’un tribunal aient poursuivi et vengé l’homicide. Caïn, qui frappa son frère, fut assassin bien avant qu’il y existât des États et des tribunaux et, tenaillé par la voix de sa conscience, il confessait: “Mon crime est trop grand pour que je puisse trouver grâce! Quiconque me rencontrera, me tuera, moi, l’assassin”.

Tu ne tueras point! Ce commandement de Dieu, du seul Seigneur qui a le droit de disposer de la vie et de la mort, fut, dès l’origine, inscrit dans le cœur des hommes, bien avant que Dieu au mont Sinaï ait promulgué en loi aux enfants d’Israël, en ces courtes phrases lapidaires gravées dans la pierre, rapportées dans l’Écriture Sainte et qu’aux enfants nous avons apprises au catéchisme. “Je suis le Seigneur ton Dieu” - ainsi débute cette loi immuable - “Tu n’auras pas d’autres dieux à côté de moi” C’est le Dieu unique, supraterrestre, omniprésent, tout-puissant, omniscient, infiniment saint et juste qui a donné ces commandements. Notre Créateur et notre unique Juge. Par amour pour nous, il a inscrit ces commandements dans nos cœurs et nous les a révélés; car ils expriment le besoin de notre nature créée par Dieu; ils sont la règle immuable d’une vie humaine et d’une vie sociale conforme à la raison, agréable à Dieu, salutaire et sainte. Dieu notre Père veut par ces commandements nous attirer, nous ses enfants, autour de Lui, comme la poule rassemble ses poussins sous ses ailes. Si nous, hommes, nous écoutons ces ordres, ces invites, cet appel de Dieu, alors nous sommes gardés, protégés contre tout danger, défendus contre la perdition menaçante, comme les poussins sous l’aile de la poule.

“Jérusalem, Jérusalem, combien de fois ai-je voulu réunir tes enfants comme la poule tes petits sous ses ailes. Mais tu n’as pas voulu” Cela se vérifiera-t-il à nouveau pour notre patrie allemande, pour notre pays de Westphalie, pour notre ville de Münster? Où en est, en Allemagne, où en est ici, chez nous, l’obéissance aux commandements de Dieu? Le huitième commandement prescrit : “Tu ne mentiras pas. Tu ne porteras pas de faux témoignage”. Que de fois ne le viole-t-on pas impunément, même publiquement? Le septième commandement dit: “Tu ne t’approprieras pas le bien d’autrui”. De qui donc la propriété est-elle encore à l’abri après l’expropriation arbitraire et brutale de la propriété de nos frères et de [5] nos sœurs, les religieux et religieuses catholiques? De qui la propriété est-elle protégée, si ces propriétés illégalement réquisitionnées ne sont pas restituées? Le sixième commandement stipule: “Tu ne commettras pas d’adultère”. Songez aux instructions et aux garanties données aux rapports sexuels libres et à la maternité en dehors du mariage, dans la fameuse lettre ouverte, publiée dans tous les journaux, de Rudolf Hess, disparu depuis. Et d’ailleurs que ne peut-on pas, dans ce domaine, même ici à Münster, en fait d’indécence et de vulgarité, lire, observer et constater?  On prépare ainsi les adultères futurs. Car par là on détruit la pudeur, sauvegarde de la chasteté. Et voici maintenant qu’on écarte aussi le cinquième commandement: “Tu ne tueras point” et qu’on le transgresse sous les yeux mêmes des autorités chargées de faire respecter la loi et la vie, puisqu’on se permet de tuer délibérément des êtres humains innocents, encore que malades, uniquement parce qu’ils sont “improductifs”, parce qu’ils ne peuvent plus produire de richesses.

Qu’en est-il de l’observance du quatrième commandement, qui commande le respect et l’obéissance à l’égard des parents et des supérieurs? Le prestige et l’autorité des parents se trouvent déjà fort amoindris et sont de plus en plus ébranlés par les exigences qu’on impose à la jeunesse, contre le gré des parents. S’imagine-t-on pouvoir sauvegarder un respect sincère et une obéissance consciencieuse à l’égard de l’autorité de l’État, si l’on continue à violer les commandements de l’autorité suprême, les commandements de Dieu, si l’on combat même, que dis-je?, si l’on cherche à extirper la foi en un seul vrai Dieu, supra-terrestre, Maître du Ciel et de la terre?

L’observance des trois premiers commandements est depuis longtemps supprimée déjà, en ce qui regarde la vie publique en Allemagne et aussi à Münster. Beaucoup profanent le dimanche et les jours de fêtes et prétendent les soustraire au service de Dieu. on ne cesse de profaner, de déshonorer, de blasphémer le nom de Dieu. Et quand [sic] au premier commandement: “Tu n’auras pas de dieux étrangers à côté de moi”; au lieu du seul vrai Dieu éternel, on se crée, suivant son bon plaisir, des faux dieux qu’on adore: la nature, l’État, le peuple ou bien la race. Et combien n’en est-il pas dont le dieu, en réalité, est le ventre, suivant la parole de St-Paul, le propre bien-être, à quoi l’on sacrifie tout, même l’honneur et la conscience; le plaisir des sens; la soif de l’or; l’ambition? Est-il étonnant, dès lors, qu’on cherche aussi à s’attribuer des prérogatives divines, à se constituer maître de la vie et de la mort du prochain?

 

“Lorsque Jésus approcha de Jérusalem, voyant la ville, il pleura sur elle et dit: “Ah! si tu voulais reconnaître en ce jour, aujourd’hui même, ce qu’il te faut pour la paix… Mais maintenant, c’est caché à tes yeux… Vois, des jours viendront sur toi, où tes ennemis t’écraseront à terre, toi et tes enfants, et ne laisseront pas chez toi pierre sur pierre, parce que tu n’as pas reconnu le temps de ta visite”.

De ses yeux de chair Jésus ne voyait alors que les murs et les tours de la ville de Jérusalem; mais sa conscience divine voyait plus loin, se rendait compte des dispositions intimes de la ville et de ses habitants: “Jérusalem, je voulais réunir tes enfants comme la poule réunit ses poussins sous ses ailes, mais tu n'as pas voulu”. C'est là la grande peine, qui opprime le cœur de Jésus, qui arrache à ses yeux des larmes: Je voulais, moi, ton plus grand bien, mais toi, tu n'as pas voulu. Jésus voit ce que ce non-vouloir a de peccamineux, d'effrayant, de criminel et de néfaste. Le petit homme, la misérable créature dresse sa volonté contre la volonté de Dieu, brave follement et criminellement la volonté de Dieu. C'est pour cela que Jésus pleure sur la faute abominable et sur l'inévitable châtiment: Dieu ne se laisse pas moquer!

Chrétiens de Münster, dans son omniscience, le Fils de Dieu n’a-t-il vu que Jérusalem et son peuple? N’a-t-il pleuré que sur Jérusalem ? Israël est-il le seul peuple que Dieu a entouré de soins paternels, couvé d'un amour de mère, protégé, attiré à Lui ? Est-il le seul peuple qui a répudié la vérité divine, qui a rejeté la loi de Dieu et s’est [6] ainsi précipité dans la ruine ? Jésus, Dieu omniscient, n'a-t-il pas alors aussi vu notre peuple allemand, notre pays de Westphalie, notre ville de Münster, le pays du Bas-Rhin ? Et n'a-t-il pas aussi pleuré sur nous ? N'a-t-il pas pleuré sur Münster ? Depuis mille ans, Il nous a, à nos ancêtres et à nous, enseigné la vérité, Il nous a conduits par sa loi, nourris de sa grâce, attirés à Lui comme la poule rassemble ses petits sous ses ailes. Le fils omniscient de Dieu a-t-Il vu alors que, à notre époque, il devrait sur nous aussi prononcer la sentence: “Vous n'avez pas voulu. Voyez, votre demeure sera détruite.” Combien cela serait terrible!

Mes Frères! J’espère qu’il n’est pas encore trop tard. Mais il est grandement temps de reconnaître, aujourd'hui même, en ce jour, ce qu'il nous faut pour la paix, ce qui seul peut nous sauver, nous préserver du châtiment divin; d'admettre franchement et intégralement la vérité divinement révélée et de manifester par notre attitude que nous voulons faire des commandements de Dieu la règle de notre vie et que nous prenons au sérieux la devise: “Plutôt mourir que pécher”, d'attirer par la prière et une pénitence sincère le pardon et la miséricorde divine sur nous, sur notre ville, sur notre pays, sur notre cher peuple allemand. 

Mais s'il en est qui continuent à provoquer le châtiment divin, qui blasphèment notre foi, qui méprisent les commandements de Dieu, qui font cause de commune avec ceux qui éloignent du christianisme notre jeunesse, qui dépouillent et expulsent nos religieuses et nos religieux, ceux qui livrent à la mort des êtres humains, nos frères et nos sœurs, avec ceux-là nous nous refusons d'entretenir de bonnes relations, nous nous soustrairont à leur influence sur nous et sur les nôtres, afin de ne point devenir leurs complices et d'être par conséquent en butte au châtiment que le Dieu de justice doit prononcer et prononcera contre tous ceux qui, comme l'ingrate ville de Jérusalem, ne veulent pas ce que Dieu veut. 

Ô Dieu, faites donc que tous aujourd’hui, en ce jour, avant qu’il ne soit trop tard, nous reconnaissions ce qu’il nous faut pour la paix. Ô Sacré-Coeur de Jésus, affligé jusqu’aux larmes par l’aveuglement et les crimes des hommes, aidez-nous de votre grâce, afin que toujours nous recherchions ce qui vous est agréable et renoncions à ce qui vous déplaît et qu’ainsi nous demeurions dans votre amour et trouvions le repos pour nos âmes. Ainsi soit-il.

Prions pour nos pauvres malades, menacés de mort, pour nos religieux et religieuses exilés, pour nos soldats, pour notre peuple, pour notre patrie et son Führer. 

 

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Pour compléter cet article, lire le livre de Jérôme Fehrenbach intitulé : <br /> Von Galen, un évêque contre Hitler.
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