Article après une allocution du général de Gaulle [François Desgrées du Loû - 13-14/07/1961 - Ouest-France]

Publié le par François Desgrées du Loû (1909-1985)

[publié le 22/02/2019]

[lien vers l'allocution de de Gaulle]

[retranscription]

 

[Ouest-France - 13-14/07/1961]

 

[titre?]

 

par François DESGREES DU LOU

 

Fierté, mais déception; inquiétude, mais résolution: il y avait de tout cela dans le discours d’hier soir, qui prenait parfois le ton d’un entretien familier avec le Français à l’écoute. La fierté, c’était pour la France vivante et agissante, qui aborde sans crainte l’”immense entreprise” de ce temps. Les accents du général de Gaulle sont de ceux qui prouvent que le patriotisme peut ne rien perdre de sa force dans l’évolution actuelle, et ce sera fort heureux - dans la mesure toutefois où subsisteront à la base, dans les foyers, dans les métiers, les libertés qui font du bien commun le bien de chacun.

La déception, c’était, et cela ne pouvait pas ne pas être, pour l’Algérie. Celui qui a voulu, au prix d’épreuves intérieures combien douloureuses, engager la parole de son pays dans un effort de coopération intégralement libre de part et d’autre, doit ressentir plus que personne certaine amertume. Le strict devoir de venir en aide à une minorité européenne menacée se traduit, dans la pratique, par cette solution de regroupement qui déçoit et qui inquiète. Est-il encore permis d’espérer que l’intransigeance d’en face cèdera au bon sens? Qui oserait le prévoir?

Si le général de Gaulle lui-même, après tant d’appels, renonce à en dire plus, et si dans le même temps il répète que la France ne refuse pas d’associer le F.L.N. aux préliminaires de l’autodétermination, c’est, de toute évidence, qu’il redoute d’autres épreuves.

Et ici apparaît l’inquiétude avec la résolution. Il va de soi que le jour où la marée totalitaire envahirait l’Europe, les contestations franco-musulmanes, les querelles les plus légitimes entre occidentaux disparaîtraient dans le malheur commun. L’affaire de Berlin, nouvelle alerte, a sonné le rassemblement des alliés, et là-dessus le général de Gaulle a parlé net. Mais il n’en faudrait pas plus pour le décider à maintenir, comme une garantie d’unité nationale, la ligne politique qu’il a fixée à son gouvernement.

Ainsi, confirmation accentuée d’un certain nombre de choix, la mise au point du 12 juillet n’aura pas surpris. On y relèvera toutefois l’hommage significatif rendu au premier ministre, à ses collègues et au parlement, avec toutes les nuances du conseil et de l’amitié. Cette question du gouvernement est de celles qu’il faudra aborder de nouveau, mais les actuels événements internationaux ne justifient que trop le souci qu’éprouve le chef d’État de maintenir envers et contre tout la cohésion et la stabilité.

 

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