Conte du Vendredi-Saint

Publié le

[publié le 16/12/2022]

[version du conte transcrite par "Mémé" (Anne-Marie Violas de Raspillère (1888-1970)]

[transcription]

24 Mars 1948

Pour mes petits enfants

Les Rameaux 1948

Conte du Vendredi-Saint

Vendredi-Saint… Le Premier Vendredi-Saint!!

C’est une très vieille histoire que je veux vous compter, mes petits enfants: l'histoire du Bon Jésus et d'un petit rouge-gorge. Écoutez bien. 

C'était au Calvaire, sur le mt Golgotha; trois croix étaient dressées, celle du Bon Jésus au milieu. Il était là, depuis longtemps déjà et tout près de mourir... Il avait tant souffert pour les péchés des hommes! En bas, près de la Croix, tout un monde d'affreuses gens l'insultaient et ricanaient, se réjouissant, les sans-cœur de le voir tant souffrir... 

La Sainte-Vierge, St Jean, Ste Marie-Magdeleine étaient là, eux aussi, mais ils ne pouvaient rien que pleurer et c'est ce qu'ils faisaient, je vous l'assure. Et vous en auriez fait autant, mes petits-enfants, car le Bon Jésus allait mourir au bout de ses forces et de son sang. 

C'était triste, affreusement triste. 

Et voilà qu'au milieu de toute cette tristesse un petit oiseau brun qui voletait par là, vint se poser sur un des bras de la Croix. 

Il ne sait où aller, ce pauvre petit; pas d'arbres aux alentours, et tous ces gens en bas, on l'air tellement méchant!!! Il va donc rester là et se reposer un peu. Et puis, il y a dans l'air, quelque chose qu'il ne s'explique pas. Il a peur le petit oiseau, et d'autant plus peur qu'il ne sait pas pourquoi. Pourtant, il est là, en sûreté; il sautille, il lisse ses plumes et regarde autour de lui. Il regarde... regarde toujours... et s’avance sur le bras de la Croix comme fasciné. Une belle Tête pâle, ensanglantée, aux yeux fermés, est là, toute proche. Quel air de douleur, de souffrance infinie. 

Le petit oiseau se sent bouleversé.... Et cette grosse, énorme épine, là, sur le front, qui entre si profond dans la chair et tout près des yeux! Oh!... oh!... il faut faire quelque chose! Alors le petit oiseau s'approche tout près de la pauvre Tête douloureuse, crispe ses pattes sur le bras de la Croix, saisit l'épine dans son bec et tire... tire... 

Ah!... enfin! l'épineux vient! elle est arrachée!

Mais un peu de sang a jailli et couvre la gorge et la poitrine du petit oiseau.

Alors le Bon Jésus ouvrit les yeux et lui sourit. Puis il dit: “Petit oiseau, petit oiseau, merci. Toi seul a cherché à me soulager en arrachant cette grosse épine qui meurtrissait mon front. Pour ton geste charmant, merci petit oiseau. En souvenir de ta pitié pour moi, toi et les tiens, resterez marqués à jamais de cette large tache dont mon sang en jaillissant, a rougi ton plumage. Tu seras le “rouge-gorge” et loué à cause de moi ôh petit oiseau, dans les siècles des siècles.” 

Puis le Bon Jésus épuisé, ferma les yeux, inclina la tête et mourut. 

Alors les ténèbres descendirent sur la terre qui trembla et se fendit. La lueur des éclairs, le bruit des tonnerres achevaient le bouleversement général; c'était affreux. 

Le petit rouge-gorge terrifié se serra encore plus contre la Tête du Bon-Jésus, ses plumes hérissées de terreur, puis trouvant que, vraiment la terre était devenue impossible, il ouvrit toutes grandes ses petites ailes et s'envola jusqu'au Ciel! 

Et depuis ce jour-là, de gris et ternes qu'ils étaient, les rouge-gorges sont devenus les charmants oiseaux que vous connaissez. Mais, regardez les bien, mes petits-enfants, et vous verrez, que dans leur petit œil rond est resté tout l’effarement des choses terribles, vues le Vendredi-Saint, par leur Ancêtre, le premier rouge-gorge. 

Aimez-les, protégez les n'est-ce pas, mes petits en souvenir du Bon Jésus qui a souffert tout cela pour vous. 

Mémé

 

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