Chronique de Rennes - Un mot aux "Nouvelles Rennaises" [Emmanuel Desgrées du Loû - 23/08/1899 - Ouest-Éclair]

Publié le par Emmanuel Desgrées du Loû (1867-1933)

[publié le 14/06/2022]

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Le Cardinal Laboré (vitrail à Guerche-de-Bretagne)

[Ouest-Éclair - 23/08/1899 - page 3 - transcription]]

CHRONIQUE DE RENNES

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UN MOT AUX

“Nouvelles Rennaises”

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Au lendemain de la tentative criminelle dont Me Labori a été l’objet, nos lecteurs se souviennent que son Éminence le cardinal Labouré a fait lire dans les églises de Rennes une lettre éloquente que nous avons reproduite immédiatement.

Le cardinal y réprouvait en termes très nets l’attentat commis la veille et profitait de cet incident pour inviter les catholiques confiés à sa direction au respect de la justice et à la pratique de la charité fraternelle.

Son langage était celui que l’Église a toujours tenu dans des circonstances analogues et, jusqu’à présent, les catholiques rennais ont prouvé par leur attitude calme et digne qu’ils n’éprouvaient aucune difficulté à suivre d’aussi sages conseils.

Or, voici que dans leur numéro d’hier les Nouvelles Rennaises que l’on n’avait pas coutume de voir si empressées autour de l’autorité ecclésiastique, s’occupent de la lettre du cardinal. Elles en font l’éloge et elles ont raison.

Mais en même temps elles montrent le bout de l’oreille… dreyfusiste et s’autorisent indûment de l’Archevêque pour se décerner un brevet personnel de justice et de charité.

Il nous a semblé, disent-elles, qu’il y avait une certaine coquetterie à prouver à nos lecteurs que les Nouvelles Rennaises, journal républicain, est le seul organe notre ville qui ait suivi, depuis le commencement de l’affaire Dreyfus, les préceptes moraux de l’archevêché.

Halte-la! mes commères! nous serons curieux de savoir comment vous pouvez justifier cette audacieuse prétention. Et comme le témoignage aimable que vous vous rendez à vous-mêmes contient un blâme implicite à l’égard de vos confrères, nous osons vous demander si, vraiment, vous avez oublié que l’Écho de l’Ouest et, un peu après, l’Ouest-Éclair n’ont cessé de recommander le calme, le respect de la justice et de la tolérance entre les Français des deux camps.

En tout cas, le moment semble mal choisi d’attaquer même en prenant des biais, les journaux qui représentent l’opinion catholique.

Nous n’avons pas encore pillé le temple protestant ni mis à sac les synagogues juives - et je croyais que les émeutiers qui ont ravagé l’Église Saint-Joseph, le dernier dimanche, n’étaient pas précisément les ennemis de votre Dreyfus.

E.D.L.

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