La journée de Dimanche [Emmanuel Desgrées du Loû - 29/08/1905 - Ouest-Eclair]

Publié le par Emmanuel Desgrées du Loû (1867-1933)

[publié le 01/12/2019]

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[Ouest-Eclair - 29 Août 1905 - retranscription]

EN PASSANT

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La Journée de Dimanche

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Nous avons eu, dimanche, une élection sénatoriale et deux discours.

L’élection a été bonne: un progressiste a battu le radical et ce succès doit nous faire d’autant plus de plaisir que nous osions moins y compter. Le département de la Loire, où M. Reymond vient d’être élu, est, en effet, l’un de ceux où le combisme s’est montré le plus entreprenant. L’administration préfectorale y avait été depuis longtemps entraînée, sous l’impulsion du “Petit-Père”, aux exercices les plus répugnants de la pression la plus effrontée et, cette fois encore, cette pression s’est fait sentir. Mais la liberté a vaincu tout de même. Bonne affaire et heureux présage.

Des deux discours, il en est un qui se distingue surtout par la prétention et la sottise, et c’est M. le ministre des colonies Clémentel qui l’a prononcé.

Il s’agissait d’inaugurer la mairie d’une petite ville des environs de Montélimar. L’on ne pouvait guère supposer qu’à ce propos, M. Clémentel éprouverait le besoin de célébrer sur le mode lyrique “le sentiment éclairé du droit et la puissance souveraine de la raison” qui se sont substitués, paraît-il, à la “foi naïve” du temps jadis. Mais M. Clémentel est un enthousiaste:

“C’est dans cet asile inviolable de la commune, s’est-il écrié, que sont solennisés tous les actes de la vie humaine. L’époux y conduit sa fiancé, la naissance et la mort y apportent leur premier écho. C’est là que s’affermissent vos droits, que se matérialisent vos devoirs.”

Ô puissance du galimatias qui peut ainsi proposer à la vénération des pieuses populations de la Drôme le sacerdoce, jusqu’ici insoupçonné, de MM. les employés de l’état-civil!... Prosternons-nous bien vite devant les attributs de la liturgie nouvelle; saluons ces registres, ces encriers, ces plumes et ce papier-buvard; saluons aussi M. le ministre des colonies Clémentel… et passons.

Mais l’autre discours?...

L’autre discours est de M. Millerand. Vous le lirez plus loin et vous verrez comment l’ancien collègue de Waldeck-Rousseau y exécute l’hervéisme et avec quelle éloquence il y affirme la nécessité de l’ordre social et du devoir patriotique.

Il y a quelques mois, j’écrivais ici-même que si M. Millerand ne jouait pas un jour, dans la République réorganisée, un rôle de toute première grandeur c’est qu’il aurait trahi sa destinée. Après son discours de Dunkerque, j’en suis plus que jamais convaincu. -E.D.L.

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